Une économie qui déraille
Mon premier appel de la semaine m’est venu d’une recherchiste de Radio-Canada qui cherchait à obtenir des informations sur les blocus ferroviaires qui durent depuis plus d’une semaine à l’échelle nationale, et sur les répercussions qu’ont sur le camionnage ces manifestations contre un projet de gazoduc qui traverserait le territoire de Wet’suwet’en dans le nord de la Colombie-Britannique.
Je surveillais évidemment du coin de l’œil ce qui se passait dans ce dossier qui ne semblait pas trop préoccupant il y a quelques jours, prêt à faire quelques appels si la situation perdurait. Elle perdure et, à chaque jour, l’inquiétude monte rapidement.
La situation est particulièrement problématique ici, alors que le CN a annoncé la fermeture de ses opérations dans l’Est du Canada, le 13 février, en raison des blocus.
Legault exhorte Trudeau d’agir. Trudeau annule son voyage dans les Caraïbes. Les partis d’opposition reprochent à Trudeau son manque de leadership. Lui dit qu’il veut une solution rapide, mais pas précipitée.
J’ignore à quel point le premier ministre comprend le fonctionnement de la chaîne d’approvisionnement mais, comme me l’a dit le président de l’Association du camionnage du Québec, Marc Cadieux, les expériences passées nous ont enseigné que lorsque le goulot d’étranglement s’installe, les événements se précipitent an cascade (lire notre article ici).
Le consommateur ne se rend encore compte de rien mais, dans les entrepôts, les choses s’enveniment, à ce qu’on m’a dit. Quand rien ne bouge sur les rails, les marchandises restent dans les entrepôts, et s’accumulent. On craint des pénuries.
«De nombreux mouvements de camionnage commencent ou finissent au chemin de fer. La chaîne d’approvisionnement n’est pas seulement intégrée du point de vue des fournisseurs, elle est également intégrée de façon modale», a déclaré l’Alliance canadienne du camionnage (CTA) dans un communiqué officiel.
«Lorsque les chemins de fer subissent une interruption de service, cela affecte tout le monde dans l’économie, y compris l’industrie du camionnage. Lorsque les ponts et les routes sont bloqués, les échanges commerciaux cessent et les autres modes et secteurs commerciaux qui dépendent des services de camionnage sont affectés négativement. L’économie canadienne dans son ensemble dépend d’une chaîne d’approvisionnement fiable et pleinement fonctionnelle.»
La plus grande perturbation est attribuable à un blocus ferroviaire sur le territoire mohawk de Tyendinaga, près de Belleville, en Ontario. Mais lundi, des manifestants ont formé un blocus de trois heures au pont des Mille-Îles, qui relie l’Ontario et l’État de New York.
L’Alliance soutient la position fédérale selon laquelle les blocus doivent cesser «pacifiquement et rapidement», ajoutant que la liberté d’expression – tout en étant un droit important – doit respecter les décisions des tribunaux et la loi.
Une ordonnance du tribunal contre la manifestation en Ontario n’a pas encore été exécutée, mais les blocus ont pris fin au Manitoba et en Colombie-Britannique.
«Dans les ports, nous commençons à voir des cas où les administrations portuaires canadiennes refusent des navires et où la marchandise commence à être réacheminée vers les ports des États-Unis. Dans d’autres cas, les expéditeurs cherchent des solutions de rechange pour déplacer la marchandise, y compris l’utilisation de camions. Lorsque l’on considère qu’un wagon unique transporte l’équivalent d’environ trois camions, une perturbation prolongée du trafic ferroviaire aurait des répercussions majeures», a déclaré Wendy Zatylny, présidente de l’Association des autorités portuaires canadiennes.
«En plus d’empêcher l’accès aux transports publics à des dizaines de milliers de Canadiens, ces perturbations limitent considérablement les mouvements d’aliments périssables et d’autres articles de consommation, des céréales, des matériaux de construction et du propane pour le Québec et le Canada atlantique», a déclaré Perrin Beatty, président et PDG de la Chambre de commerce du Canada.