Pont Champlain : point de vue de l’Ordre des architectes
L’Ordre des architectes du Québec (OAQ) s’inquiète du lobbyisme des promoteurs des partenariats public-privé qui, dans une lettre publiée le 21 juillet dernier, réclamaient que le pont Champlain soit réalisé en PPP.
Pour appuyer leurs propos, les promoteurs québécois des partenariats public-privé modifient leur discours habituel et citent en exemple le Viaduc de Millau, en France. L’OAQ en prend bonne note et rappelle que, si ce viaduc a effectivement permis un geste architectural majeur, c’est parce qu’il a été réalisé de façon fort différente des Private finance initiative (PFI) britanniques, dont ils n’ont cessé de faire l’apologie. L’État français a organisé un concours d’architecture et d’ingénierie qui a permis de retenir les services de l’architecte Norman Foster et de l’ingénieur Michel Virlogeux. Ensuite, la construction, l’entretien et l’exploitation de l’ouvrage ont été confiés au privé, qui a mis en œuvre le concept. On est loin du modèle des PFI que le Québec a expérimenté jusqu’à maintenant!
L’Ordre a déjà exprimé le souhait que la collaboration étendue avec le privé, si elle était privilégiée, devait au minimum permettre une conception préalable indépendante, autant en terme d’architecture que d’ingénierie. On s’assure ainsi d’obtenir le meilleur bâtiment ou la meilleure infrastructure.
L’OAQ souhaite aussi que les infrastructures emblématiques comme le pont Champlain soient l’occasion de gestes architecturaux remarquables, comme c’est le cas dans de nombreuses sociétés auxquelles le Québec se compare. Une infrastructure de qualité, qu’il s’agisse de bâtiments ou d’autres types d’infrastructures publiques, est définie par le triptyque « harmonieux, fonctionnel et durable. » On ne le répétera jamais assez : aucun de ces trois aspects ne doit être négligé. La qualité est économiquement et socialement rentable. Quant aux économies à tout prix, elles finissent par coûter cher, comme le prouve l’exemple du pont Champlain, à bout de souffle après à peine un demi-siècle, alors que son voisin Victoria frôle les 150 ans.
Il n’est pas inutile de rappeler qu’aucun mode de réalisation ne garantit une réalisation dans les coûts et les délais ou un entretien adéquat des infrastructures publiques. Pas plus les PPP que les modes traditionnels ou clé en main, pour ne citer que les plus courants.
Même quand ils sont mis en œuvre de façon adéquate, dans le respect des règles de concurrence et de bonne gouvernance, de la réglementation en matière d’environnement et de construction, les PPP sont plutôt complexes, longs et coûteux pour les finances publiques. Rappelons également qu’une infrastructure telle un pont est censée avoir une durée de vie qui dépasse les 35 ans que dure habituellement un contrat de PPP et donc de son entretien par le consortium qui l’a construite.
Renseignements sur l’Ordre des architectes du Québec
L’Ordre des architectes du Québec a pour mission de contribuer au bien-être et à l’essor de la société québécoise par la promotion de la qualité dans la conception et la production architecturale. Cette contribution s’appuie sur une démarche d’ouverture et d’échange avec le public ainsi que sur une amélioration constante de l’exercice de la profession. Il a été particulièrement actif sur le dossier des PPP, menant un combat constant pour faire abandonner la vision dogmatique de ce mode tel que mis en œuvre au Québec depuis 2004 et pour en dénoncer les travers.
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